« Le naufrage des civilisations » par Amin Maalouf
Editions : Grasset
Parution : Mars 2019
332 pages
22 €
Le lyrisme d’Amin Maalouf ne dépare pas son observation politique. Sa tristesse est légitime. Elle concerne le sort de ses deux pays d’origine, celui de sa famille maternelle, l’Egypte, et le Liban, pays de son père, journaliste comme lui. Elle concerne aussi l’Europe, sa terre d’adoption, et toute la planète. Car, à force de constater les sempiternelles erreurs de l’humanité, cet observateur-né devient, non pas un Cassandre comme pourrait le faire croire le titre de son livre, mais un homme libre sûr que le naufrage des civilisations peut être encore évité. Selon lui, le pessimisme de notre époque s’explique principalement par les désillusions probantes du communisme, l’outrecuidance américaine et un sentiment d’échec croissant chez les Arabes depuis la naissance d’Israël et la Guerre des Six Jours. Amin Maalouf n’est pas un rêveur ni un dissimulateur. Tout son livre se base sur des évènements politiques, éclairés avec le recul du temps. Il déplore ce désir d’homogénéité des peuples qui augmente l’intolérance, il rend le morcellement des empires et l’étendard des religions responsables des conflits, dénonce le renversement des valeurs morales. Il met en garde autant contre l’égoïsme sacré de l’individu que le dirigisme d’un état athée. Le naufrage du « paquebot humain » ne sera évité que si les mentalités changent. Car de multiples turbulences de tout ordre menacent et Amin Maalouf de les énumérer jusqu’à la dernière page. C'est sciemment que celui-ci se veut alarmiste, pour ne pas dire pessimiste. Et pourtant le miracle semble exister, le voeu de sa grand-mère est exaucé: la statue de Ste Thérèse sur le seuil de sa maison d’Egypte résiste encore à toutes ces intempéries …
B.C.D.