Editions : Gallimard
Parution : Décembre 2007
264 pages
17 €
Alexandre Jardin n ‘est pas le premier à soulever les graves séquelles psychologique sur la jeunesse des actes de guerre, dissimulés par faiblesse ou par souci de protection. C’est ce que nous révèle le journal intime de chacun des deux frères Schiller, Rachel et Malrich, fils d’un nazi allemand Hans Schiller. Après les horreurs de la 2ème guerre mondiale, « le SS, l’exterminateur, l’usurpateur »se réfugie en Algérie, se bat pour l’indépendance, adopte la nationalité algérienne et se convertit à l’Islam pour épouser la jeune Aïcha. Très vénéré dans son village, il est malheureusement égorgé le 24 Avril 1994, avec son épouse, par les talibans lors d’une cruelle razzia dans leur calme petit bled « en emportant avec lui son secret dans la tombe ». Ses deux fils, qui avaient été prudemment confiés à un oncle dans une banlieue parisienne défavorisée, vont tout faire pour commémorer, chacun à leur façon, ce père et le révéler dans toute sa vérité. L’aîné, parfaitement intégré à la société française, meurt de honte, de folie et de chagrin : « se découvrir le fils d’un bourreau est pire que d’avoir été soi-même un bourreau ». Le cadet, beaucoup plus jeune et inculte, se bat pour faire connaître l’Histoire. Car c’est la loi du silence qui engendre le crime, et les jeunes de la cité doivent connaître la vérité, les dangers du fanatisme et de la haine, les similitudes entre nazisme et islamisme et leurs méthodes barbares, jusqu’à ce que justice soit faite. « Dire la vérité, partout dans le monde ». Tel semble l’intention première de l'auteur talentueux, Boualem Sansal, comme s’il était à la fois témoin du passé et responsable de l’avenir. Mais ce n’est pas facile de contrer un imam qui maintient par la force la nécessité de l’islam dans la cité, qui confirme le statut d’émir à « l’Eradicateur » de Nadia , petite coiffeuse de 16 ans aux mèches blondes, et de pécheurs à ceux qui se désolidarisent de leur frère en islam… Livre plein d’actualité qui fait peur, de réalisme quant à la nature humaine mais d’espoir dans la capacité de discernement d’une jeunesse encore saine !
Brigitte Clavel