Editions : JOSE CORTI
Parution : Janvier 2011
325 pages
19 €
Tatiana Artel semble écrire, comme peint « le môme », avec un style prolixe et coloré, voire même parfumé des intentions de son tendre clown Giacomo : apaiser les souffrances de ceux mis au rebut de la société. Le lecteur, dès le début, est frappé par la réitération du rouge qui s’oppose au gris, comme si la vie était une lutte constante entre la chance et la malchance, entre la vie et la mort qui lui court après. Le môme est un enfant abandonné qui s’élève seul dans une décharge avec, pour seul jeu, les couleurs qui suintent des plastiques bleus. Melle B. a un toit, et des parents sans cœur qui la font passer pour folle. Giacomo, lui, reçoit l’amour de parents artistes que la mort vient interrompre sans crier garde. Ainsi se construisent peu à peu, avec des mots et des couleurs, des vies bien différentes. A la joyeuse piste multicolore du cirque où chacun est solidaire, s’oppose un « salon bourgeois » où pèse un silence exécrable nourri d’anxiolytiques. Giacomo vieillit, mais le gris de sa vieillesse tant redoutée a la douceur de celui qui précède le soir et non de « l’épaisse poussière de l’indifférence du monde ». Roman magnifique qui transforme l’existence comme par magie. Le lecteur se retrouve avec un cœur d’enfant. Il réalise qu’il s’est fait bercer par le style envoûtant de Tatiana Arfel. Certes il lui a concédé quelques préjugés contre une société avilissante et des solutions utopiques, mais il est heureux d’avoir fait un très beau rêve.
Brigitte Clavel