30 mai 2018
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Editions : BoD=Books on Demand
Parution : Octobre 2017
232 pages
16,50 €
Comment un jeune chrétien peut devenir un grand prédicateur salafiste avant de servir le djihadisme, tel est le sujet abordé par Elie Saad sous forme de roman. Rien de bien nouveau sur cette jeunesse déracinée qui ne trouve pas sa place dans le monde occidental et voit en la religion chrétienne un bouc émissaire parfait. Ce que cherche à montrer l’auteur c’est le danger de toute religion quand le dogme prime sur la compassion. Voilà ce à quoi aura à faire face le jeune Cédric Destrongville une fois devenu orphelin et incarcéré par erreur judiciaire. C’est en effet en prison qu’il découvre la religion musulmane dont la simplicité doctrinale le séduit davantage que le mystère de la sainte Trinité. Cédric saura-t-il discerner le vrai du faux, écouter sa propre conscience plutôt qu’une idéologie imposée par des caïds qui lui font miroiter une grande mission à accomplir ? Saura-t-il percevoir la différence entre un silence christique et une propagande politique ? Et si l’erreur est inévitable pour ce jeune sans références, le dénouement fait penser au roman « Crime et châtiment » de Dostoïevski, où la paix intérieure ne peut venir qu’avec l’aveu des fautes personnelles et l’aide de personnes aimées autant qu’aimantes… Ainsi Elie Saad combat à sa façon pour la possibilité d’une entente inter-religieuse. Sera-t-il entendu ?
B.CLavel Delsol
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2017
11 avril 2018
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Editions : LePassage
Parution : Septembre 2017
138 pages
15 €
Toute vie est un roman et celle de Marie-Antoinette, arrivée à Lyon dans les années 50 pour faire ses études d’infirmière, inspira Isabelle Kauffmann, elle-même médecin et écrivain. Sans doute une ressemblance entre les deux femmes est à l’origine de cette biographie, car du très beau style de l’auteur émerge une telle fusion avec son héroïne que le lecteur pourrait bien les confondre. Ces deux soignantes ont la même sensibilité devant la souffrance, la même volonté de soulager si ce n’est de guérir et de transmettre leur confiance en la vie. Forte de son énergie et de son esprit d’indépendance Marie-Antoinette abandonna son statut d’hospitalière pour devenir une des premières infirmières libérales de Lyon, consciente que la misère morale qui accompagne la maladie n’était pas exclusivement concentrée dans les hôpitaux. Isabelle Kauffmann la présente dans toute son humanité, depuis sa tendre enfance dans la campagne au sein d’une nombreuse fratrie à laquelle elle doit cet « équilibre fondateur » jusqu’à ses éprouvantes tâches professionnelles. Rien n’est inventé, le lecteur retrouve l’ambiance des hôpitaux lyonnais, les religieuses à cornettes aussi dévouées qu’endurcies, les grands pontes en chirurgie qui drainèrent à Lyon toute une clientèle internationale et ce grand vide à combler entre les guérisseurs et « les corps fragiles ». Marie-Antoinette met un nom sur chacun de ses patients, comme si l’auteur ressentait la nécessité d’humaniser toujours davantage une médecine de plus en plus technologique.
B.C.D.
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2017
20 mars 2018
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Editions : Gallimard
Parution : Décembre 2017
426 pages
22 €
Pour Pierre Assouline « dans toute vie, l’identité est centrale ». Son dernier livre, à la fois roman, plaidoirie, document historique, essai philosophique, le démontre parfaitement avec un mélange de tonalités qui va de l’humour au tragique, du réalisme au poétique. L’auteur part d’un fait historique précis qui rejoint son cas personnel : en 2015 Sa Majesté Felipe V rappelle en Espagne les Séfarades du monde entier expulsés de son pays en 1492. Sans hésitation P. Assouline s’inscrit à l’Institut Cervantes de Paris avant de partir sur la terre de ses ancêtres car « le vrai tombeau des morts est le cœur des vivants ». Là il voyage au gré d’une providence qui lui fait découvrir que le récit national va au-delà des évènements, que l’identité personnelle ne doit pas rester figée et après avoir réconcilié les deux Espagne en lui-même, la catholique et la révolutionnaire, la traditionnelle et la moderne, il ne se sent « ni français, ni espagnol, ni juif, ni séfarade » mais un humain comme les autres, qui pense à ses morts, exècre les extrémistes sans réfuter le nationalisme. Alors peu importe si la lenteur de l’administration tarde à lui délivrer ce que les Catalans eux-mêmes rejettent ! Malgré le sérieux du sujet, P. Assouline parvient à capter notre attention par mille détails vivants jusqu’à rapprocher Thérèse d’Avila de Fanny Ardant et à nous faire croire que sa grand-mère dansât au bras de Franco! Sans doute est-ce pour oublier que de nos jours l’antisémitisme existe encore, mais que la réconciliation est toujours possible…
B.C.D.
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2017
6 mars 2018
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Editions : Gallimard
Parution: Décembre 2017
280 pages
19 €
Le livre posthume de J. d'Ormesson n'est pas dénudé d'intérêt. On y retrouve l'homme cultivé, avide de la vie, curieux de l'histoire de l'univers, passionné des lettres, conscient de la fin inéluctable de toute chose et de la nécessité d'une promesse. Etre en osmose avec l'humanité , rappeler le prix du sang versé pour parvenir à notre civilisation, tel est son objectif. Alors il traverse le temps et l'espace, tous les maux et bonheurs, accompagnant princes ou sages, démons ou bandits, aventuriers ou prédicateurs. Car ce sont les hommes avec leur liberté qui font l'Histoire. Ainsi,dès la découverte du Nouveau Monde comme de l'imprimerie de Gutenberg, sont lancées les prémisses d'une culture démocratique universelle où artistes et philosophes sont le sel de la terre, bien plus précieux que les conquérants. C'est grâce à ses auteurs que la France a atteint le premier rang dans le monde et J. d' Ormesson peint chacun d'eux avec une telle connaissance qu'il finit par se confondre sans le moindre scrupule avec leurs héros. Jusqu'au bout il séduit par sa vivacité habituelle, sans tristesse apparente.Avec beaucoup d humour, il continue sans cesse à remonter le temps en tout sens, sans pouvoir s'arrêter jusqu'à explorer le ciel, découvrir Dieu dont "il est impossible de parler ", alors il se tait à jamais. Ce livre révèle indéniablement la passion de l'auteur pour le monde qu'il veut embrasser une dernière fois avant de le quitter. Plein de fantaisie et d'amour de la vie, il mérite d'être lu.
B.C.D.
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2017
12 février 2018
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Editions : Notabilia
Parution : Octobre 2017
191 pages
14 €
Ce roman est aussi intense en sentiments qu’en richesse d’écriture. Le personnage principal est l’absence, celle qui dévore l’âme. Mais a contrario, celle-ci, au lieu de rendre tout obscure, éclaire les incompréhensions de la vie. C’est ce que semble vouloir exprimer Gaëlle Josse dans ce roman d’après guerre où le sort de la narratrice est tragique: une enfance pauvre et sans tendresse, un veuvage dû à une erreur des bombardements britanniques, le départ d’un fils causé par un beau-père trop dur. La colère va s’estomper pour laisser place à des sentiments tout aussi tristes mais plus lucides. Les Britanniques ne sont-ils pas des alliés, l’élève des Jésuites n’est-il pas un mari aimant et l’enfant n ‘est-il pas aussi empreint de liberté intérieure que sa mère ? Alors elle fait le choix de l’attendre, elle lui écrit, se prête aux siens mais ne pense qu’à lui. Beaucoup d’écrivains ont rendu hommage à leur mère, mais peu ont su exprimer un amour maternel aussi fort. Gaëlle Josse y excelle dans ce long monologue, où les mots sont simples, les phrases poétiques, l’affliction empreinte de pudeur. Pour échapper à cette douleur intime elle crée de la couleur en imaginant une fête pour son retour, et bien plus encore… Mais l’enfant prodigue reviendra-t-il à temps ? Livre très émouvant qui mérite d’être lu. B.C.D.
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2017
9 février 2018
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Editions : Robert Laffont
Parution : Décembre 2017
300 pages
19 €
Si l’île de Lampedusa est la honte du monde, elle est pour l’auteur une histoire d’amour. Le récit du jeune narrateur remonte à ces dix dernières années où le flux d’immigration n’a cessé d’augmenter, a révolutionné les mentalités et anéantit le cœur de son père pêcheur, traumatisé par les morts accrochés dans ses filets. Les naufrages, les incendies sur bateaux, les secours insuffisants, les tentatives d’amitié et les révoltes d’incarcérés sont relatés avec autant de véracité que d'émotions. L’île semble avoir une valeur didactique. Elle s’inscrit dans la réalité concrète et permet d’ajouter une réflexion métaphysique à une étude sociale à partir de différents comportements : collaboration avec les politiciens, léthargie administrative, indifférence ou résistance, piété mystique ou intérêts personnels, résignation ou autoritarisme, tout est présent, sans jamais la moindre amertume mais le souci permanent pour le narrateur de ne pas devenir comme son père, un mort vivant inutile. Mais où se trouve l’efficacité ? Ni la Vierge de Roberto Merlo, ni « la Porte de l’Europe » de Mimmo Paladino , ni le musée « de la confiance et du dialogue entre les peuples de Méditerranée» ne semblent jouer leur rôle. Seul le narrateur anonyme est transformé, il s'appelle Nicolo et n'hésite plus entre "partir ou rester" : il sera là où il doit être, là où il est né, là seulement où l'on peut être heureux. Un livre bouleversant où l’angoisse de la vocation personnelle rejoint celle de l’Occident jusqu’à celle des Evangélistes désignés à être des « pêcheurs d’hommes »….
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2017
21 janvier 2018
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« Les vestiges du jour » par Kazuo Ishiguro
Editions : Folio
Parution : Novembre 2017
339 pages
L'auteur de ce roman, qui a été tourné en film peu de temps après sa parution, a attendu près de trente ans pour recevoir le prix Nobel de littérature. Pourtant le récit de Sir Stevens, un majordome devoué, va au-delà d'un pastiche des mœurs britanniques. Six jours d’escapade dans la campagne anglaise suffisent à celui-ci pour comprendre un passé où son sens du devoir poussé à l’extrême a sans doute porté tort à son bonheur, mais point à son honneur. Certes son dévouement pour Lord Darlington l’a rendu aveugle sur les évènements insidieux qui suivirent le traité de Versailles. Cette loyauté n'est-elle pas justifiée par la probité d'un Lord qui lui-même se laisse un temps abuser, puis reconnaît ses erreurs et s'empresse de convoquer Churchill dans son manoir après y avoir reçu des " anges noirs" et autres personnalités telles que Lord Halifax, Keynes et Ribbentrop? Si Sir Stevens a fermé les yeux sur des situations douloureuses et même sur des instants de bonheur, il perçoit grâce à ce petit voyage dans le Somerset un monde nouveau: les temps sont révolus où la position sociale ne permet pas de s’exprimer. Mais la loyauté est pérenne et rend émouvante la candeur de Sir Stevens qui, comme son propre père le lui avait appris, met toute sa dignité à remplir humblement sa tâche, quitte à oublier de badiner et d’aimer...
B.C.D.
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2017
17 janvier 2018
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« Caractériel » par Denis Tillinac
Editions : Albin Michel
Parution : Décembre 2017
174 pages
15 €
Les souvenirs de jeunesse en littérature ne sont pas morts avec Jean d'Ormesson. Denis Tillinac prend la relève en entremêlant humour et nostalgie, autodérision et remords. Cette vraisemblable autobiographie reflète le romantisme d'une génération, certes choyée, mais souffrante d'une éducation rigoureuse justifiée par les deux guerres qui l'avaient précédée. Caractériel ou névrosé, tels furent les qualificatifs attribués par les psychologues à cet enfant qui faisait le désespoir d’une mère trop anxieuse. En fait celui- ci avait pour seul défaut un amour incommensurable de la vie que ses nerfs ne parvenaient pas à maîtriser. Semblable au Parisien d'aujourd'hui qui ne se confond pas en mondanités, l’enfant voulait échapper à toute discipline et ne trouvait son bonheur que dans la campagne de ses aïeux, persuadé de pouvoir élucider dans cet eldorado tous les mystères du monde. Sa profonde sensibilité, toujours dissimulée derrière une brutalité apparente, transperce ce roman du début à la fin. Dorénavant le lecteur ne sera plus dupe de la jovialité de Denis Tillinac : il saura que derrière l’écrivain se cache un peintre que seules apaisent les couleurs de la Corrèze.
B.C.D.
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2017
8 janvier 2018
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Editions : Philippe Rey
Parution : Octobre 2017
122 pages
29 €
Si dans le film « Des hommes et des dieux » Michael Lonsdale représente un saint homme, dans son dernier livre c’est un mage que l’on découvre, plein de sagesse et de générosité. Comme pour apaiser l’angoisse humaine, il offre un recueil de textes consacrés à la Vierge Marie, tous écrits par des grands écrivains, de Dante à Victor Hugo, de Rilke à Jean-Paul Sartre, chacun d’eux illustré par un tableau célèbre, de Bellini à Gustave Moreau. Ce n’est pas la reine toute puissante des cieux couronnée d’étoiles qu’il nous présente, mais celle qui est pureté et douceur maternelle, contemplatrice de la création, consolatrice de tous les maux, souffrante mais pleine d’espérance comme celles qui croient en leur destinée. Plus encore que la beauté des peintures et la diversité des auteurs, ce qui touche le plus dans ce livre c’est la modestie de Michael Lonsdale avec laquelle il apporte sa petite touche personnelle. Il attribue un titre plein de poésie à chacun des extraits, il commente le rapport entre la peinture et le texte choisi avec une immense humilité, soucieux de ne rien imposer mais d’ouvrir les yeux à ceux qui ne voient pas le Salut. Car si Marie accepte la visitation, pleure au pied de la croix, elle est aussi toute la joie dont Dieu s’est servi pour descendre jusqu’à nous, nous faire aimer la vie et en défaire les nœuds avec sa patience …
B.C.D.
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2017
5 janvier 2018
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Editions : Gallimard
Parution : Juillet 2017
593 pages
23,90
A la mauvaise conscience du narrateur d’avoir usurpé, dans les années soixante-dix, des écrits de Manfred Arius pour rédiger son mémoire universitaire s’ajoute un mystère : pourquoi son propre père dénommé Grant ne lui a jamais parlé des liens d’amitié qu’il avait entretenus avec cet artiste célèbre d’origine prussienne ? Qui est ce Manfred Arius suspecté d’antisémitisme pour avoir fréquenté l’école baroque de Lambach dans sa jeunesse? Puis soupçonné d’être un sympathisant du capitalisme occidental malgré sa fidélité au communisme et sa participation à la guerre d’Espagne, tout en étant qualifié d’agent de la Stasi ? Pour mieux comprendre ce XXème siècle le narrateur nous plonge dans la R.D.A d’après guerre, dans sa diabolisation de l’Ouest, dans ses écoles de Moscou ou de Golm qui mettent en place tout un système de dénonciation, d’harcèlement ou de liquidation pour tout opposant au régime. Et si leurs adeptes semblent n’avoir d’autre objectif que de servir le Parti, le narrateur découvre à quel point les agissements de chacun reposent sur leurs propres faiblesses. Arius le bourgeois de bonne famille ne s'est-il pas converti au marxisme par amour pour une femme et ouvert à l'Ouest grâce à son amitié pour Grant? Le sentimentalisme apparent de Mielke fait preuve de la plus grande cruauté quand il s’agit de surveiller le Rideau de fer. Si Götz se charge d'éliminer les punks, cette "vermine" venue de l’Ouest, sa chasse n’est elle pas uniquement due à son attrait obsessionnel pour Jeanette? Alors la profonde dépression d’Arius n'est-elle pas justifiée? Heureusement l’image récurrente du cénotaphe de Newton, emblème de la famille d’aérostiers d’Arius, symbolise inlassablement la liberté, la fuite et pourquoi pas le rappel d’un ailleurs bien meilleur? Livre très riche, à la fois plein de romantisme et de réalisme, et si le lecteur a quelque mal à pénétrer dans cette triste atmosphère, il a plus encore de peine à la quitter. B.C.D.
Published by brigitte clavel-delsol
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2017