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31 juillet 2012 2 31 /07 /juillet /2012 14:13

 

 

 

Editions : Gallimard

Parution : Mai 2012

318 pages

24 €

 

   

 

Dans ce beau roman, Livaneli  ouvre les portes d’Istanbul et ses secrets. Présent et passé s ‘entremêlent comme une tentative de  réconciliation entre deux mondes : celui des aristocrates de l’Empire ottoman et des nouveaux  riches avides de revanche, celui   des rives du Bosphore  dont les palais font rêver   et  le quartier  de Cihangir  habité  par des artistes fauchés.  La « Grande Dame » Leyla  fait partie de ces  familles aristocratiques  de  Roumélie , province perdue lors de la guerre des Balkans. Du  palais  istanbuliote de ses ancêtres, il ne lui reste plus qu’une petite maison au fond du parc d’où elle est expulsée. Mais un jeune journaliste qui l’admire depuis sa tendre enfance fera tout pour l’aider. Et c ‘est ainsi que Leyla par son éducation humaniste et cultivée parviendra à sauver ceux qui pensent la sauver. Cette très  jolie histoire semble  intemporelle : superstitions, conformisme, arrivisme, jalousie, rébellion ou magouilles, tout est subtilement relaté pour déboucher sur une fin pleine d’espoir : seul  l’amour désintéressé, à ses risques et périls, procure le vrai bonheur.

B.Clavel

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8 juillet 2012 7 08 /07 /juillet /2012 09:49


 

Edition : Flammarion

Parution : Mars 2012

291 pages

20€

 

Quel  bonheur d’entrer au «  Studio de l’inutilité » de Simon Leys ! Le lecteur y retrouve toutes ses illusions perdues. Peu importe si Michaux n’a jamais fait les voyages qu’il a racontés car « poète imaginatif »  il l’a toujours été et le restera. Le seul regret, c’est qu’il ait toujours souffert de n’être pas «  monsieur tout le monde ». Voilà à quoi Simon Leys  invite le lecteur : ne pas vouloir devenir un « idiot utile » qui épouse l’air du temps, ni un intellectuel désincarné  que  l’idéologie écarte du chemin poétique  de la vraie vie. Car, comme le dit  le prince de Ligne, le seul art qui compte est « l’art de vivre ». La considération pour toute créature et l’intérêt pour tout bâtisseur ont alors priorité. Et comme le proclame Orwell, « la brutalité intellectuelle est impossible quand on connaît la personne ». Mais Simon Leys rappelle le désespoir de Milosz qui vécut  simultanément le nazisme et le communisme et dénonça la sottise et l’aveuglement des Français incapables de réaliser « que si quelque chose existe quelque part, elle existera n’importe où ». Et Milosz de conclure  « l’horreur est la loi du monde des créatures vivantes, et l’objet de la civilisation est de masquer cette vérité. » Telle est la fragilité humaine que Simon Leys se plaît à nous rappeler comme un prophète éconduit à cause de trop de franchise. Car ce qui  s’est passé en  Chine en vingt ans  s’est passé aussi au Cambodge en trois ans : la dictature révolutionnaire, avec tout ce qu’elle comporte de crimes  et de  mensonges, est universelle. Alors il est temps de quitter le studio de Leys car « l’envie de silence en forme de discours spécial » propre à Barthès gagne le visiteur attristé par tant de cruautés innommables  et l’incognito de tant de dignités  humaines …Mais Simon Leys ne le laisse pas partir sans conseils : « Quelle sorte d’avenir peut-on bâtir sur l’ignorance obligatoire du passé récent ? » Il recommande  alors de ne pas enfouir ces horreurs dans l’oubli car « c’est aussi  de nous qu’il s’agit » et non d’une planète lointaine. Heureusement, quel que soit l’environnement, l’art persiste quand l’artiste a le souci d’être vrai, les naufragés survivent quand ils mêlent l’espoir à la bonne volonté,  et la grâce de Dieu demeure si l’élite intellectuelle n’est pas une usine à fabriquer des  diplômes mais une  école qui forge des hommes.

Brigitte Clavel

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27 juin 2012 3 27 /06 /juin /2012 08:32

 

 

 

Editions : De Borée

Parution : Juillet 2012

283 pages

20 €

 

 

Catherine Ecole-Boivin est une historienne peu banale. Au lieu de relater  l’héroïsme des grands de l’Histoire, elle préfère dévoiler la vie de ceux qui ont souffert en silence. Dans ce livre où elle aborde le sujet du viol en cherchant les causes et en exposant les conséquences,elle semble vouloir dans un premier temps proclamer haut et fort ce qui a l’habitude d’être dissimulé, bannir superstitions et secrets de famille afin que l’être humain puisse s’épanouir comme il se doit. Car comment se construire quand il n’y a ni amour ni vérité ? Et si la responsable n’était autre que la Seconde Guerre mondiale,  et le silence  la plus grande preuve d’amour ?  Des dates précises ponctuent ce roman et en font une histoire vraie. Mais réalité ou fiction, peu importe. L’essentiel est de savoir que « dans ce renouvellement constant, ce mouvement perpétuel, rien de ce que l’on donne à la vie n’est vain… tout se répare. »

B.C

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20 juin 2012 3 20 /06 /juin /2012 07:36

 

 

 

Editions : Albin Michel

Parution : Janvier 2011

403 pages

23 €

 

 

Ce roman, bien américain, plonge le lecteur dans une psychose que l’auteur semble attribuer à la génétique certes, mais facilitée par la  technologie. Si  les jeunes protagonistes  ont  du mal à accepter la société telle qu’elle est, ils y nagent comme des poissons dans l’eau.  Trois histoires parallèles se déroulent  aussi vraisemblables qu’époustouflantes.  Ryan,  dans l’Etat du Michigan, retrouve son père biologique qu’il croyait être  son oncle, un  baroudeur malhonnête et drogué, bien plus attrayant que son père adoptif. Lucy, jeune étudiante à Pompey dans l’Ohio, suit, sans bien le connaître mais avec une confiance aveugle, son professeur d’université George Orson. Miles recherche son jumeau Hayden, schizophrène qu’il aime profondément. Thriller au fil conducteur très plausible et plein de fines analyses psychologiques, le livre révèle que la plus grande fragilité humaine peut  camoufler, sous un physique insoupçonnable, un dangereux mythomane. Pour exister, des hommes  sont disposés  à jouer tous les rôles, séducteurs, menteurs, escrocs, assassins. Sans scrupule  ils montent des sociétés fictives sur internet ou suppriment des parents gênants, changent de passeports  en même temps que de pays. Et pendant cette folle course-poursuite à la quête d’une identité, ils ne retrouvent plus leurs repères, les paysages de l' enfance ne sont plus les mêmes et leurs proches, sans rien comprendre, deviennent leurs souffre-douleurs.  Dan Chaon parvient  à donner « le vertige et la nausée » et faire croire qu’ « on peut être qui on veut » et avoir plusieurs vies. Seuls un frère et  une sœur sont toujours là pour témoigner que  le  vrai soutien ici-bas  est la famille.

B.C

 


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13 juin 2012 3 13 /06 /juin /2012 09:30

 Editions : Actes Sud

Parution : Février 2012

214 pages

18,50 €

 

 

Si ce  livre débute  par l’enterrement d’Adèle, vielle juive polonaise exilée en France « à défaut d’Amérique », deux voix s’alternent pour la faire revivre. D’abord celle de Suzan, avocate juive américaine,  qui remémore l’amour d’Adèle pour son  vieux père quand il était un jeune Yankee. Puis celle de l’arrière-petite-fille d’Adèle, Fleur, qui porte le poids d’un lourd passé féminin et se réjouit de n’avoir engendré que des garçons. Car le thème de ce livre porte essentiellement sur la vocation féminine. Les nombreuses femmes qui habitent ce roman  sont toutes différentes les unes des autres. Mais, en remontant le temps, l’auteur ne fait qu’accroître la similitude de leur existence au milieu des guerres, pogromes, exil, racisme ou conformisme bourgeois selon le lieu et l'époque.  Cependant, quels que soient le choix de vie  et le continent habité,  leur attitude vaillante ou leur nature tourmentée, leur esprit d’indépendance ou de soumission, leur cœur généreux ou profiteur, un thème récurrent  domine ce roman : le  désir, chez chacune, de vivre intensément, de «se réinventer sans cesse et changer quelque chose au monde »… Le lecteur ne perd pas son temps à lire ce joli livre plein de psychologie, où, comme le dit l’auteur, « il en va de la littérature comme des êtres humains ».

Brigitte Clavel

 

 

 

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10 juin 2012 7 10 /06 /juin /2012 21:05

 

 

 

 

Editions :  Albin Michel

Parution : Avril 2012

115 pages

12 €

 

 

 Comme tout romancier prolixe E-E Schmitt ne craint pas d’aller chercher son inspiration en d’autres lieux et ne se  limite pas à une narration fictive, même si elle en a tout l’air. « La Chine, c’est un secret plus qu’un pays ». Et c’est précisément ce secret  qu’E-E Schmitt  veut élucider. Bien que la natalité  soit strictement contrôlée dans ce pays totalitaire, une femme a osé braver la loi. Mais  Mme Ming a-t-elle vraiment eu les dix enfants qu’elle dépeints et façonne avec amour ? La sagesse qui perce dans ses moindres propos, comme dans l’échine courbée des travailleurs, reflète l’âme de son pays: la philosophie de Confucius. Ainsi ni le communisme ni le mercantilisme ne semblent satisfaire la Chine profonde et silencieuse qui puise son courage dans un spiritualisme respectueux de l’homme et une probité qui lui fait préférer l’incertitude à la vérité officielle….

Brigitte Clavel

 

 

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9 juin 2012 6 09 /06 /juin /2012 09:04


 

 

 

Editions : Grasset

Parution : Mars 2012

278 pages

18,50 €

 

C’est toute l’âme de la sainte Russie que nous présente Elisabeth Barillé à travers son triple désir: retrouver la terre natale que son grand-père maternel Georges Sapounoff a dû fuir,  marcher dans les pas de  Rilke et  Lou Andreas-Salomé,  enfin écrire  pour faire revivre tout ce que ses aïeux lui ont légué. Sans hésitation aucune, l’héroïne se lance dans ce voyage car elle sait  que,  si l’esprit slave a été étouffé, il n’est pas mort. Quatre chapitres dépeignent Saint-Pétersbourg la belle, Moscou l’effrontée, la Volga ensorceleuse, Koursk au parfum de tilleuls. Chacun de ces lieux parcourus  apparaît comme une  « nouvelle Jérusalem », terre promise où le pèlerin avance, avec pour seul guide, le secret de l’exil forcé. Et ce n’est que petit à petit qu’Elisabeth Barillé  découvre  enfin ce qu’elle est venue chercher : sous le  désordre  apparent  des choses,  la raison de toute existence, un besoin de réconciliation, d’identification peut-être, de libération sans doute, d’écriture très certainement…en tout cas une vraie légende littéraire,emplie autant d'émotions que de réalisme historique !

Brigitte Clavel

 

 

 

 

 

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3 juin 2012 7 03 /06 /juin /2012 16:39

                  

 

 

 

Un dixième de millénaire mesure une vie

Vingt centenaires font deux mille ans

J’ai toujours cru maintenant je sais

l’homme n’est pas créature parmi d’autres

 

Il existe moins de mots dans le dictionnaire

qu’il n’y a d’espèces inventées par la vie

L’âge d’un grillon peut être de trois-cent mille ans

ou même de plusieurs millions d’années

 

Le coq de bruyère est un animal fabuleux

Un jour viendra il deviendra fossile

L’homme lui n’est pas toujours merveilleux

mais son Esprit inspire le livre du temps

 

Chaque homme est unique au monde

Le don est d’offrir l’amour qu’il a reçu

Les sédiments anciens ne sont que des archives

Les matières ordinaires composent une pierre précieuse

 

La substance de l’âme imprime l’invisible

Comment trouver dans l’inventaire des espèces

les restes de pensée d’un seul homme sur la terre

Depuis des milliards d’années pourtant la Pensée vivait

 

La « vicariance »est une valse entre deux continents

du temps où les créatures chantaient le cantique

des genèses promises comme autant de tragédies

Car l’homme avant de naître « était » depuis longtemps

 

On a tort de confondre la durée et le temps

Le temps est le présent que nous firent les âges

comme un cadeau qu’on n’en finit pas d’ouvrir

pour à la fin connaître qui l’avait envoyé

 

La valse des créatures improvise pour nous

l’infiniment Complexe de l’aventure humaine

entre infiniment grand et infiniment petit

L’Infinition enseigne à aimer l’Univers

 

Il est étrange que ce mot manque au dictionnaire

Infinitif est le mode que la pensée préfère

L’impératif adieu y cherche son destin

Le savant y découvre que la mort n’existe pas

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31 mai 2012 4 31 /05 /mai /2012 15:13

Editions : L’Arpenteur

Parution : Avril 2012

165 pages

13,90 €

 

 

 

Ces dix-sept nouvelles font penser aux descriptions de Zweig car Marie Causse présente avec beaucoup de finesse une série d’instantanés, où physique et habitudes sont toujours reflets de l’âme. Chacun des personnages se fond dans  la ville. Celle-ci est grise et humide. Ceux-là, même habillés de couleurs, passent inaperçus et  mêlent  en silence leurs pleurs à la pluie, sans doute à cause  de déceptions refoulées. Comme le lecteur ils ont  hâte d’entrevoir un petit coin de ciel bleu. Mais l’auteur ne change pas de cap : même au milieu d’une histoire d’amour, ou devant un piano, un sentiment d’échec colle à la peau. Néanmoins tous avancent avec détermination sur le bitume, où les souvenirs heureux stagnent comme les flaques d’eau. Car le champ fleuri de vacances enfantines, la course des nuages, l’odeur de tabac froid d’une chevelure aimée ou une simple affiche publicitaire sont suffisants pour procurer l’état de grâce tant recherché…

Brigitte Clavel

 

 

 

 

 

 

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28 mai 2012 1 28 /05 /mai /2012 09:32

                                     

 

 

 

 

Editions du Seuil

Parution : Mai 2012

247 pages

20 €

 

Après avoir traduit en français  dix-huit sermons, dont dix inédits,  de Maître Eckart, Eric Mangin semble vouloir remettre à l’honneur ce prêcheur  dont la  poétique mystique peut envoûter notre siècle autant que le Moyen-Age. En effet philosophe et  théologien, Eric Mangin cache, sous sa culture éclectique, un souci certain d’apporter  une ouverture d’esprit, voire un élan  de l’âme, en incitant ses lecteurs  à suivre maître Eckhart dans « la profondeur de l’intime », dans ce « fond sans fond » qui élucide bien des mystères, car plus guère de personnes aujourd’hui ne ressentent la présence  de Dieu dans leur vie.  La solution de maître Eckhart est d’acquérir une « solitude intérieure », non pas en  fuyant  le monde, mais simplement  en changeant sa façon de le regarder. Selon celui-ci, un détachement total s’impose jusqu’à « la triple déprise » : dépossession du monde, de  Dieu et de  soi. C’est ainsi seulement que naît le Verbe dans l’intime. Et si, à force de sonder cette âme, celui-ci venait à se dérober, c’est simplement parce que le sujet d’amour, dans la vie ordinaire, comme dans la vie spirituelle, est inappropriable, inaccessible. Et c’est là que maître Eckhart et Eric Mangin laissent tomber leur rôle de théologien, préférant être poètes , celui-là chantant le silence de l’âme, espace infini, lieu de rencontre avec Dieu, celui-ci  prônant une  fusion avec le monde, théorie plus contemporaine. Mais le lecteur  reste sur sa faim,  il n’a pas trouvé dans cette lecture  le Dieu transcendant qu’il espérait.

Brigitte Clavel   

 

 

 

 

 

 

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