Editions : La Table Ronde
Parution : Janvier 2015
171 pages
16 €
Aucune parution récente sur la guerre de 14 ne saurait égaler en poésie ce joli livre que l’on doit autant à son auteur Michel Bernard qu’à Maurice Ravel son inspirateur. Le biographe n’y omet aucun détail de la vie de l’artiste. L’un comme l’autre sont convaincus que la création artistique puise sa source dans les aléas du quotidien . Le compositeur Ravel, réformé du service militaire, n’acceptera pas une vie confortable à Paris tandis que ses amis partent dans les tranchées. Engagé volontaire, il devient le conducteur Ravel qui fait maints allers retours entre Bar-le-Duc et Verdun dans son camion militaire « Adélaïde », heureux de ravitailler les soldats et de ramener du front blessés et prisonniers en souffrance. Plus qu’une leçon de courage, c’est une invitation à savoir regarder le monde que nous donne Ravel, jusqu’à en fixer dans sa mémoire les moindres détails. Sans détourner ses yeux des horreurs guerrières, il perçoit l’espérance qui perce les forêts nocturnes d’où sa composition « Adélaïde ou le langage des fleurs» ; il remarque les talents de Paul Wittgenstein musicien autrichien amputé pour lequel il écrit « Concerto pour la main gauche ». Mais le souvenir du passé reste vivace et lui inspire « La Valse », recomposition de la musique de Strauss d’avant-guerre. Si Michel Bernard mentionne à peine le "Boléro", c'est que Ravel estimait le succès de cette oeuvre immérité: à cette ritournelle incessante, sempiternelle alternance des heurs et malheurs, Ravel préférait de beaucoup ses autres envolées musicales où il se sentait "délivré de la pesanteur". Et c'est ainsi que la musique rejoint la littérature...
Brigitte Clavel Delsol