Editions du Seuil
Parution : Mai 2012
247 pages
20 €
Après avoir traduit en français dix-huit sermons, dont dix inédits, de Maître Eckart, Eric Mangin semble vouloir remettre à l’honneur ce prêcheur dont la poétique mystique peut envoûter notre siècle autant que le Moyen-Age. En effet philosophe et théologien, Eric Mangin cache, sous sa culture éclectique, un souci certain d’apporter une ouverture d’esprit, voire un élan de l’âme, en incitant ses lecteurs à suivre maître Eckhart dans « la profondeur de l’intime », dans ce « fond sans fond » qui élucide bien des mystères, car plus guère de personnes aujourd’hui ne ressentent la présence de Dieu dans leur vie. La solution de maître Eckhart est d’acquérir une « solitude intérieure », non pas en fuyant le monde, mais simplement en changeant sa façon de le regarder. Selon celui-ci, un détachement total s’impose jusqu’à « la triple déprise » : dépossession du monde, de Dieu et de soi. C’est ainsi seulement que naît le Verbe dans l’intime. Et si, à force de sonder cette âme, celui-ci venait à se dérober, c’est simplement parce que le sujet d’amour, dans la vie ordinaire, comme dans la vie spirituelle, est inappropriable, inaccessible. Et c’est là que maître Eckhart et Eric Mangin laissent tomber leur rôle de théologien, préférant être poètes , celui-là chantant le silence de l’âme, espace infini, lieu de rencontre avec Dieu, celui-ci prônant une fusion avec le monde, théorie plus contemporaine. Mais le lecteur reste sur sa faim, il n’a pas trouvé dans cette lecture le Dieu transcendant qu’il espérait.
Brigitte Clavel