25 février 2015
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Editions : Seuil
Parution : Janvier 2015
188 pages
17 €
Ce roman est une immersion dans la vie cubaine où la perfidie du régime de Fidel Castro contraste avec la description des habitants qui aiment la musique, le rhum et les femmes. Belle tentative d’un écrivain qui a connu le régime communiste et qui veut prouver, comme un de ses protagonistes dénommé Le Poète, que l’amour est mieux que la révolution, et tente ainsi, mais en vain, de réconcilier politique et poésie. Pourquoi Alfredo, Guinéen parisien, débarque-t-il à La Havane ? Il n’est pas un touriste habituel, il ne se rend ni sur les plages ni dans les musées. Son plaisir est de chanter le refrain d'une chanson cubaine, de danser la salsa mieux que les cubains, de répéter le nom de Juliana, de se recueillir sur une tombe du cimetière de Colon, en un mot de renouer avec ses origines. Mais les opposants sont nombreux. Pourquoi son hôte Roberto, qui « sait tout de Cuba », surveille ses allers retours ? Pourquoi le milicien El Tosco lui remet une lettre d’expulsion ? Pourquoi le Poète, qui « sait tout du monde » prédit qu’il ne pourra jamais être heureux ? Cette succession d’interrogations ne décourage pas le lecteur tant le narrateur, le jeune Ignacio, émeut par sa perception de son pays et son opiniâtreté à élucider un drame humain, le tout dans un contexte géopolitique où les Cubains sont aveuglés par trop de soleil et assourdis par trop de musique…Livre qui vaut un beau voyage !
B Clavel Delsol
Published by brigitte clavel-delsol
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2015
28 janvier 2015
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Editions : Grasset
Parution : Janvier 2015
233 pages
19 €
La plume de Patrick Rambaud est séduisante, pleine de gaieté, sans disproportion entre la réalité et la tragi-comédie. Le personnage principal, Tchouang, est né vingt-cinq siècles en arrière, dans un petit royaume du fin fond de la Chine où sa bonne éducation et ses talents personnels sont reconnus, non par le prince, mais par le bouffon de celui-ci! Le lecteur comprend vite le but de l’auteur : témoigner des conséquences fatales de tout système figé et hypocrite, qu’il soit politique, social ou religieux. Tandis que Chouang ne cesse de développer son esprit d’observation et de préserver sa liberté de penser, les similitudes avec le monde d’aujourd’hui s’accumulent. Le royaume de Song tourné inlassablement vers son passé court à sa ruine tandis que la convoitise stimule son voisin, jusqu’à ce que ce celui-ci se perde dans la débauche et que la guerre prenne sa revanche. L’opulence suscite l’avilissement, le despotisme engendre la révolte, le fanatisme religieux génère la folie meurtrière. Tchouang voue toute son admiration aux artisans « car les mots, ça ne remplace pas les mains ». Certes la nature est un livre de savoir vivre, la campagne un lieu de prédilection, car « en ville les gens deviennent fous ». Mais Tchouang ressemble plus à l’ « honnête homme » qu’au « bon sauvage ». Rien n’échappe à son esprit perspicace: tandis que certains régimes font en sorte que leur peuple obéisse sans réfléchir, d’autres paient des penseurs à penser, des fonctionnaires à se taire ou des espions à dénoncer. L’esprit de compétition, l’emmurement dans des traditions obsolètes ou des convictions immuables empêchent l’homme de voir « le provisoire des choses ». Et si la sérénité est perpétuellement bouleversée par des évènements impromptus, c’est que « l’homme limité » oublie être dans « un monde illimité ». Livre enjoué, très opportun, rempli de maximes inoubliables, qui mérite d’être lu à la lettre car « on ne doit pas édulcorer la pensée du maître ». Un appel urgent à l’harmonie entre le cœur et la raison, entre le sérieux et la légèreté, entre le ciel et la terre, comme entre le yin et le yang…
B. Clavel Delsol
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2015
14 janvier 2015
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Editions : La Table Ronde
Parution : Janvier 2015
171 pages
16 €
Aucune parution récente sur la guerre de 14 ne saurait égaler en poésie ce joli livre que l’on doit autant à son auteur Michel Bernard qu’à Maurice Ravel son inspirateur. Le biographe n’y omet aucun détail de la vie de l’artiste. L’un comme l’autre sont convaincus que la création artistique puise sa source dans les aléas du quotidien . Le compositeur Ravel, réformé du service militaire, n’acceptera pas une vie confortable à Paris tandis que ses amis partent dans les tranchées. Engagé volontaire, il devient le conducteur Ravel qui fait maints allers retours entre Bar-le-Duc et Verdun dans son camion militaire « Adélaïde », heureux de ravitailler les soldats et de ramener du front blessés et prisonniers en souffrance. Plus qu’une leçon de courage, c’est une invitation à savoir regarder le monde que nous donne Ravel, jusqu’à en fixer dans sa mémoire les moindres détails. Sans détourner ses yeux des horreurs guerrières, il perçoit l’espérance qui perce les forêts nocturnes d’où sa composition « Adélaïde ou le langage des fleurs» ; il remarque les talents de Paul Wittgenstein musicien autrichien amputé pour lequel il écrit « Concerto pour la main gauche ». Mais le souvenir du passé reste vivace et lui inspire « La Valse », recomposition de la musique de Strauss d’avant-guerre. Si Michel Bernard mentionne à peine le "Boléro", c'est que Ravel estimait le succès de cette oeuvre immérité: à cette ritournelle incessante, sempiternelle alternance des heurs et malheurs, Ravel préférait de beaucoup ses autres envolées musicales où il se sentait "délivré de la pesanteur". Et c'est ainsi que la musique rejoint la littérature...
Brigitte Clavel Delsol
Published by brigitte clavel-delsol
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2015
13 janvier 2015
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Éditions : Flammarion
Parution : janvier 2015
300 pages
21 €
Cassandre ou prophète, bavard grossier ou philosophe, poète refoulé ou bobo parisien obsédé, Michel Houellebecq semble être tout à la fois. Dans son dernier roman, avec l’esprit provocateur qui le caractérise, il caricature la souffrance morale du XXIème siècle avec tant de sarcasme et de réalisme que son antihéros finit par être la honte de nous-mêmes. Ce dernier est l'intellectuel typique, éternellement insatisfait de ses expériences sexuelles et agacé par son incompréhension de la religion catholique. Déçu jusqu'au dégoût par ses semblables comme par lui-même, il finit par se retrouver bien seul. Et si sa thèse sur Huysmans l'a absorbé momentanément jusqu'à se rendre comme celui-ci à l’abbaye de Ligugé, c’est bien que "le temps à rebours" a commencé. Mais les évènements politiques rattrapent cet homme paumé et c’est là que la fable commence. L’année 2022 voit le parti musulman modéré gagner les élections présidentielles grâce à l'aide des socialistes et de la droite, qui croient ainsi exclure du territoire les identitaires d'extrême-droite comme les fondamentalistes du djihâd. Les universitaires fidèles au nouveau régime sont alors grassement récompensés, les femmes de quarante ans reléguées au pot-au-feu derrière le sexisme des adolescentes, le devoir des renseignements généraux est le silence pour ne pas alarmer, et celui du premier ministre, en la personne du malheureux François Bayrou, d'obéir béatement pour ne pas diviser. A la grande satisfaction de tous, la France devient un immense souk, le chômage disparaît au profit des petits métiers, et le culturel meurt. Ainsi s’éteint la civilisation chrétienne car s'instaure à pas de velours le totalitarisme d´Etat, qui a pour solution la "soumission" et pour conséquence le reniement du Christ, incarnation de l'amour et de la liberté. Triste parodie dotée d'une inquiétude sous-jacente et d'un ton dérisoire indéniables.
B Clavel Delsol
Published by brigitte clavel-delsol
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2015