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9 mars 2016 3 09 /03 /mars /2016 19:51

 

 

 

Editions : Guérin

Parution : Octobre 2015

263 pages

19,50 €

 

L’autodérision  de  cette autobiographie révèle à quel point l’incompréhension mutuelle d’un père et d’un fils, à laquelle s’ajoute la pudeur des mots,  peut engendrer une tristesse indélébile. Sans doute une sévérité excessive à l’encontre d’un enfant hypersensible peut être mal vécue, comme elle le fut chez l’auteur de cette autobiographie. Mais la rigueur morale d’Henri Queffélec ne  peut-elle pas s’expliquer par  le souci de l’aristocrate sans argent, soucieux de la réussite sociale de ce fils qu’il considère comme le mouton noir de la famille et auquel il semble préférer un aîné plus conformiste ? A cela s’ajoute la suffisance intellectuelle  du romancier  reconnu qui l’empêche de discerner les talents de l’écrivain en herbe. Une chose est certaine  c’est que Yann Queffélec puise dans cette attitude paternelle toute son inspiration. Challenge conscient ou inconscient, alternance d’amour et de crainte, d’admiration et de révolte, le livre aborde les thèmes chers à Françoise Dolto tels que  le « reproche d’être né » ou  la «manie d’être aimé » dans un style très expressif mais  tout à fait différent de celui qu'il nomme "l'homme de ma vie".

Brigitte Clavel Delsol  

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7 mars 2016 1 07 /03 /mars /2016 20:54

 

 

Editions : Atlande

Parution : Décembre 2015

160 pages  

 

Rien de théâtral dans cet ouvrage de J-L Jeener, directeur de théâtre, écrivain, dramaturge, metteur en scène, mais une réflexion sur la foi, bouleversante de vérité. Le monde actuel est contradictoire : rien de plus facile pour nos contemporains que de croire en la technologie, mais impossible pour eux de reconnaître Dieu. La force  persuasive de l’auteur est dans sa distinction entre certitude et conviction. Il est aisé de combattre une certitude, mais rien ne peut anéantir une conviction comme celle des Pères de l’Eglise ou celle du simple croyant. Dépasser le rationnel, n’est-ce pas faire preuve de liberté ? De même, accepter la nature humaine pécheresse pour la métamorphoser, n’est ce pas poursuivre  la création ? La sottise est de vouloir être Dieu. Mais reconnaître l’altérité et remplacer l’identification de l’homme avec Dieu  par la filiation, là est l’intelligence. Et si l’esprit religieux s’amenuise, n’est-ce pas au profit d’une nouvelle fraternité conseillée par le christianisme lui-même? Car  Dieu porte en lui la diversité du monde. Et J-L Jeener de répondre à tous les mystères  qui rebutent l’incrédule : il éclaire le dogme de la Trinité par la charité du Dieu amour qui est Un, il considère les sacrements comme des grâces  agissantes,  génératrices d’espérance, la mort comme un chemin vers une vie nouvelle, et la parole de Dieu comme « un silence plein » qu’il faut savoir entendre…Belle réflexion documentée où « le coup de gueule » annoncé par l’auteur se transforme en un partage de sa foi. A savoir que « le théâtre du Nord-Ouest » dont il est responsable dans le 9ème arrondissement de Paris offre un répertoire de pièces de très grande qualité.  

B. Clavel Delsol

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2 mars 2016 3 02 /03 /mars /2016 20:19

 

 

 

Editions : Actes Sud

Parution : Août 2015

378 pages

21,80 €

 

Frantz Ritte, musicologue autrichien, se réfugie dans la fumée de l'opium à défaut de comprendre les critiques de son ami à l'encontre des cultures  orientales qui envahissent le monde d'aujourd hui. Et si son amour impossible pour Sarah , orientaliste passionnée, n'était autre qu'un rêve tout aussi semblable à celui qu'il veut vivre avec l'Orient? Une insomnie nocturne l'entraîne dans ses souvenirs de voyage où accompagné de celle-ci il découvrit la Syrie et l'Iran. Mais plus que Damas et Téhéran c'est l'impact de l'Orient sur les arts occidentaux qui le marque, que ce soit dans le domaine de la musique ou de  la littérature, des aventures amoureuses ou spirituelles. Pas étonnant que "Boussole" ait remporté   le  dernier prix Goncourt car le lecteur  y trouve  un style proustien indéniable, un romantisme digne de Chateaubriand, et une hantise de la déchéance soulagée à l’opium à l’image  des  poètes maudits. Plus encore  que par sa forme, c’est sa thématique qui  séduit : il s'agit à tout prix de rapprocher l'Occident et l'Orient. "L'orientalisme c'est de l'humanisme avant tout...Il n'est pas honteux de se laisser aller aux sentiments". Cependant "Boussole" ne se limite pas au sentimentalisme , il est un long recueil culturel qui "met en lumière le don de la diversité",  au profit de la paix. Mais est-ce vraiment préparer la paix que de se réfugier dans la drogue et parler de  "la dictature du cantique catholique"? N'est-ce pas plutôt une dangereuse perte d'identité qui fait la faiblesse de l'Occident? 

Brigitte Clavel Delsol 

 

Editions : Actes Sud

Parution : Août 2015

378 pages

21,80 €

 

Le narrateur Frantz Ritte, alter-ego  de l'auteur Mathias Enard, se présente comme un simple fumeur d'opium qui vit dans son nuage.En fait il a du mal à se remettre de la conférence  d'un de ses amis qui  a dit publiquement souffrir de voir l’art  grec et  romain menacé au profit de l’islam, de l’hindouisme et du bouddhisme et annoncé ainsi la fin du monde.Alors qu'il est traité de pleutre par cet ami et éconduit par Sarah, une orientaliste passionnée dont il est éperdument amoureux, Frantz, musicologue de profession, en perd le sommeil. Une nuit d'insomnie va lui permettre de repenser aux multiples découvertes culturelles  rencontrées lors de ses voyages avec Sarah à Damas et Téhéran. Les souvenirs jaillissent pêle-mêle, et  si les tempéraments opposés de Sarah et Franz ne font que déboussoler notre fragile narrateur, celui ci ne peut que reconnaître  l'influence indéniable de l'Orient sur les artistes et aventuriers occidentaux, qu'elle soit faste ou néfaste, créatrice ou annihilante. Pas étonnant que "Boussole" ait remporté   le  dernier prix Goncourt car le lecteur  y trouve  un style proustien indéniable, un romantisme digne de Chateaubriand, et une hantise de la déchéance soulagée à l’opium à l’image  des  poètes maudits. Plus encore  que par sa forme, c’est sa thématique qui  séduit : il s'agit à tout prix de rapprocher l'Occident et l'Orient. "L'orientalisme c'est de l'humanisme avant tout...Il n'est pas honteux de se laisser aller aux sentiments". Mais "Boussole" ne se limite pas au sentimentalisme , il est un long recueil culturel qui "met en lumière le don de la diversité",  de l'amour et de la paix.

Brigitte Clavel Delsol 
 
 
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8 février 2016 1 08 /02 /février /2016 17:36

 

Editions : J’ai lu

Parution : Novembre 2015

183 pages

6,10 €

 

 

L’intérêt du livre est multiple. Le style de Laurent Seksik est étonnamment  semblable à celui de Stefan Zweig. Même symbolique de l’environnement : les montagnes d’Amazonie offrent la  liberté escomptée, mais  les rues de Rio suscitent l’agoraphobie et  la chasse des nazis se poursuit jusque dans les rêves nocturnes.  Même rythme : de longues périodes, méandres de la pensée et des sentiments, sont  entrecoupées de dialogues réalistes ou de phrases brèves et décisives. Le drame vécu ne décroît pas  d'intensité malgré le cadre enchanteur. Plutôt qu’un roman il s’agit tout à la fois  d’une biographie détaillée et d’une fine étude psychologique. Le lecteur y découvre  tout un monde d’écrivains célèbres de l’époque  qui  s’acharnent à redonner espoir à un apatride plein de scrupules et d’angoisse. Malheureusement la seule issue est celle de Kleist, le héros du tout premier roman de Zweig, dont le titre, « Le combat avec le démon », révèle une âme  incurable. Ce livre de Laurent Selsik  est  très beau.  Il semble non seulement inspiré par Zweig lui-même mais par tous ceux qui l’ont compris et aimé.

Brigitte Clavel Delsol 

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3 février 2016 3 03 /02 /février /2016 16:53

 

Editions : Albin Michel

Parution : Février 2016

202 pages

 

Le style de Pauline-Gaïa  Laburte  est alerte comme le petit Ritzy, tonique comme le climat valaisan, prometteur comme le prénom de baptême du jeune  Petrus Theodolus César Ritz. Le lecteur rentre d’emblée dans cette biographie même s’il ne porte pas grand intérêt à l’histoire de l’hôtellerie du XIXème siècle. Ce jeune paysan suisse déborde de tant d’ambition  qu’il communique son plaisir à découvrir les richesses du grand monde et les façons de  le satisfaire. La  clé de voûte de la  réussite est le Client et ce sera sa devise. Cireur de chaussures ou de parquets, groom ou serveur, maître d’hôtel ou directeur général, peu importe.  Le  Paris d’Haussmann avec son Exposition universelle le passionne, mais il ne s’y enferme pas. Il parcourt l’Europe entre stations balnéaires et villégiatures de montagne, de Lucerne à Cannes en passant par Prague et Trouville, séduit princes  et célébrités. Ni l’épidémie  de choléra de 1876  ni le tremblement de terre de 1887 ne l’empêchent de réaliser ses rêves, de multiplier ses palaces, de sauver de la faillite  le   Grand Hotel de Monaco et le Savoy de Londres. Mais l’argent est un veau d’or, l’épuisement veille, la tête se brouille, il dessine des plans d’hôtels à n’en plus finir. La vie est un tourbillon,  emporte César Ritz, mais laisse derrière lui  une image de luxe aux quatre coins du monde. Le style de l’auteur ressemble à son protagoniste : précis, énergique, fantaisiste, tragique, en un mot séduisant.

Brigitte Clavel Delsol

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28 janvier 2016 4 28 /01 /janvier /2016 11:52

 

Editions : Albin Michel

Parution : Novembre 2015

19 €

 

A l’heure où l’église catholique est critiquée de toute part, un livre sur l’Inquisition n’a guère d’attrait. Et pourtant ce petit carme espagnol arrivé à Rome en 1598 pour suivre des « leçons d’Inquisition » est des plus attachants. Le lecteur est  tout en  phase avec lui, du début à la fin, pour détecter en toute humilité les  horreurs morales  dont sont responsables les confortatori au nom de la Sainte Cause et constater les tortures innommables infligées aux hérétiques ou à ceux susceptibles de l’être. Le rythme adopté par Sandor Marai au début du livre est très lent, les phrases  s’embourbent dans les forces du mal contaminées par la peur.  Rome se réjouit quand a lieu un  autodafé  car le peuple  est comme l’Eglise,  préfère la foi aveugle à la connaissance, l’obéissance à la liberté de penser.  Mais le miracle est une chose qui existe.  Giodarno Bruno, l’apostat récalcitrant, ne meurt pas pour rien. A peine est-il mort que son excellence le cardinal  de la Sainte Inquisition de Rome le regrette déjà et réalise que « la persuasion patiente et bienveillante » est plus efficace que le fanatisme religieux. Le petit carme s’enfuit mais ne trouve pas d’avantage la chaleur du Christ en Helvétie où se déchirent calvinistes et luthériens. Ce livre magnifique éclaire les limites de la nature humaine qui, en toute bonne conscience, impose son pouvoir au lieu de brûler d’amour pour l’humanité. Car Sandor Marai savait de quoi il parlait : hongrois d’origine, il souffrit du fascisme et du stalinisme, et écrivit ce livre en 1974 avant de se suicider, désespéré par tant d’indignité. Belle opportunité  pour nous qu’ Albin Michel  le réédite cette année, au moment où Daech apparaît comme la folie résurgente des hommes ! 

Brigitte Clavel Delsol

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25 janvier 2016 1 25 /01 /janvier /2016 09:30

 

 

Editions : Albin Michel

Parution : Novembre 2015

141 pages

14,50 €

Palmyre est morte, mais Paul Veyne l’immortalise. Sa  dédicace en dit long : ce livre est dédié à  Khaled-al-Assad, archéologue, directeur général des Antiquités de Palmyre de 1963 à 2003, assassiné pour « s’être intéressé aux idoles ». En fait d’idoles, il s’agissait des chefs-d’œuvre architecturaux  et artistiques qui furent rasés par Daech en Août 2015. Et Paul Veyne de guider  le lecteur  dans les rues de Palmyre et dans son passé historique, au temps où les sanctuaires des dieux  Bêl et Baalshamîn se dressaient  comme le Saint-Marc de Venise : fiers de leurs colonnes, des irrigations alentour, des caravaniers et des princes-marchands. A la fois tribu syrienne et cité hellénisée, la culture hybride de Palmyre fit toute sa grandeur. Vraie cité de l’Empire, elle avait besoin de Rome et ses légions contre les razzias perses, de même que Rome avait besoin de sa cavalerie lourde de lanciers bardés de fer qui fit la gloire d’Odainath et de son épouse Zénobie. Ainsi Palmyre est restée toujours elle-même, libre, multiculturelle, inventive et créatrice. Alors la voix de l’historien s’élève contre cet anéantissement non justifié, si ce n’est  par la haine de la liberté.

Brigitte Clavel Delsol

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19 janvier 2016 2 19 /01 /janvier /2016 19:27

 

 

 

Editions : Albin Michel

Parution : Avril 2015

343 pages

21,50 €

 

 

Daniel Picouly n’a rien oublié des couleurs de la Martinique de ses ancêtres. Les Amazones sont des  maîtresses femmes, amies du roi du Dahomey en exil, plus fortes que la fièvre jaune  et les trafiquants  de rhum, prudentes face aux  menaces de la montagne Pelée,  conscientes de la supériorité feinte des Blancs face aux  sentiments d’infériorité des Noirs. L’humour et l’autodérision dictent ces pages  où les superstitions contrastent par leur pittoresque naïveté avec  la guerre de 14-18 qui réclame sans pitié des soldats créoles, parmi lesquels se trouve Jean Jules Joseph, le grand-père du narrateur. Celui-ci, aimant depuis sa tendre enfance Aurore, la fille du plus riche planteur de l’île, a plus d’un ennemi jaloux et sera accusé à tort de crimes crapuleux. Ce sont précisément ces accusations injustifiées que découvre son petit-fils. Car Jean Jules Joseph a porté toute sa vie un secret si douloureux  qu’il est devenu comme son iguane, incapable de crier sa révolte, mais prêt à souffrir en silence par amour pour ceux  qu’il aime. Un beau voyage  pour ceux qui rêvent de Martinique, une belle conclusion : on peut aimer deux fois…

Brigitte Clavel Delsol

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10 janvier 2016 7 10 /01 /janvier /2016 09:54

 

 

Editions : Robert Laffont

Parution : Février 2015

237 pages

19 €

         L’automne 1793 est le moment le plus tragique de la guerre de Vendée et c’est  cette période  qui inspire  Y. Viollier  comme elle insuffla à Pierre-Jean David,  célèbre sculpteur du XIXème siècle plus communément appelé David d’Angers, la réalisation de la célèbre statue du général vendéen Bonchamps.  La démarche narrative de Y. Viollier  ressemble à la construction de cette sculpture. L’histoire  évolue au même  rythme que le buste de Bonchamps. Deux récits en un, la vie du sculpteur et la vie du général, un chef d’œuvre littéraire qui égale en beauté ce marbre de David, même si David a du mal à le réaliser. Car il arrive que l’inspiration lui fasse défaut : au souci de perfection du sculpteur s’ajoute une immersion de souvenirs, une enfance malheureuse, un père alcoolique révolutionnaire épargné de la mort par le général qui fit grâce aux cinq mille soldats  républcains prisonniers dans l'église de Saint-Florent-le-Viel. Y. Viollier ressuscite à merveille ce fait historique trop souvent oublié. Il invite le lecteur à aller admirer cette statue où la  miséricorde trancende la haine,  comme le marbre la terre glaise.  Magnifique.

Brigitte Clavel Delsol

 

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8 janvier 2016 5 08 /01 /janvier /2016 08:18

 

Editions : Albin Michel

 

Parution : janvier 2016

263 pages

19,80 €

Estimation : 4,5/5

 

 

C’est une Sylvie  Germain toujours éveillée aux problèmes du monde que le lecteur retrouve   dans son dernier roman. Sa  fusion avec la nature  pleine de  poésie et sensualité ne l’empêche pas de voir la part d’animalité dans l’homme qui est à l’origine d’une  barbarie impitoyable toujours  au nom d’appartenances politiques ou religieuses. Si  elle invite « à la table des hommes », c’est pour révéler la nécessité de  la prise de conscience des forces du mal et susciter une renaissance personnelle. Son protagoniste s’appelle Babel, nom de la confusion. Car Babel ne comprend rien au monde ni à aucun  langage. C’est un être innocent, un enfant sauvage, qui  jouit de son insouciance  jusqu’au jour où il devient conscient de  la cruauté des hommes et devient Abel, comme le juste. Mais pour cela, il doit  se réapproprier le monde, ne pas avoir honte d’appartenir au rang d’adultes, car si beaucoup sont des prédateurs, d’autres l’ont sauvé par leur amour.  Joutes oratoires ou silence sage, fuite ou volte face devant le tragique de la vie et la finitude humaine, rien n’échappe à Abel.  Et quand un commando surgit et extermine ses amis, il s’oblige à ne penser qu’aux beautés de la vie, à la corneille fidèle, à la mère courageuse, au ciel étoilé. Car l’important ce n’est pas de plaire à ses semblables ni de vouloir exister à leurs yeux, c’est de se souvenir de ce qui a été reçu, de s’émerveiller  plus que de comprendre, de rendre grâce plus que de pleurer… Livre magnifique et plein d’originalité, où un léger souffle spirituel suffit à balayer la bestialité de l’homme. 

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